Le sapin de l'église

Scène 1 (one man show)

Introduction : montage photo avec le bûcheron qui part chercher le sapin. Cette
introduction nécessite un présentateur et une personne chargée de faire défiler les
photos sur écran.

Scène 2 (one man show)

« Julien à la suite d’un appel lancé à la jeunesse par le pasteur le dimanche précédent,
s’était retrouvé seul devant le sapin tassé devant l’Eglise. »


Julien : Ah, formidable, je suis le premier arrivé ! Les autres ne devraient plus tarder. Il
est vraiment beau ce sapin, c’est sûrement le roi des forêts.
Le téléphone sonne

Julien : Allo ? Oui salut les gars ! Comment ça va ? Quoi ? Vous ne pouvez pas venir ?
Mais pourquoi ? Des bouchons sur la route ? Il faut pousser la voiture ? Des bouchons et
pousser… Vous poussez pas le bouchon un peu loin ? Mais et le sapin ? Il va se décorer
tout seul ? Il n’y a personne pour m’aider ? Si on le rentre pas le sapin nous aussi on se
fera enguirlander. Ah ! les boules...
Alors ça, alors ça je le savais ! C’est la meilleure ! Tous les ans le sapin c’est un sujet
épineux ! Le sapin c’est un peu comme le cochon d’inde à la maison : tout le monde le
veut mais personne ne s’en occupe. Bon eh bien je vais faire ça tout seul alors !
Julien charge le sapin sur son dos

Julien : Ouf ! Les responsabilités c’est lourd à porter !
Julien traîne le sapin dans la salle de culte (voir pour la conception des décors). Il dresse
le sapin et commence à le décorer.
Julien continue son monologue tout en décorant le sapin.

Julien : Ils seront tous bien content demain quand ils verront le sapin ! Quand on me
demandera un jour quel était mon rôle au sein de l’Eglise, je répondrai que j’étais le chef
décorateur du sapin ! Ah ils ont eu des problèmes sur la route, l’année dernière c’était un
problème de banque. On peut dire qu’ils ont fait banqueroute ! Et demain ils seront tous
là : « Ooh le beau sapin, c’est sûrement le roi des forêts ! » et devine qui s’en est occupé
du monarque ? Le bouffon de service !
Et le pasteur ? Il pensera à me remercier ? Comme d’habitude il saura pas qui est venu.
Oh mais attendez, quand je serai parti à l’internat, il n’y aura plus de sapin ! Alors fini les
bouchons la veille de Noël, tu verras la route comme elle va se déconstiper !

Il regarde une boule

Julien : Je deviens maboule !
Alors voyons ce que ça donne : ah mais c’est pas mal du tout ! Mon beau sapin roi des
forêts, tu me rends la vie dure !
Ah je crois que je me suis déplacé un tibia dans le dos. Mais c’est joli avec toutes ces
jolies choses qui pendent. Là, il y une petite crèche. Nous sentons que la crèche ne sera
pas un feu de paille, elle fera un effet boeuf ! Ici plein de bougies... Dommage qu’il n’y ait
pas plus de lumières qui soient venu m’aider.
Bon on va passer un petit coup de balai pour enlever toutes ces aiguilles de sapin par
terre sinon, si le pasteur voit toutes ces aiguilles il va piquer un stress.
Il s’approche de la Bible posée sur l’autel. Il souffle les aiguilles du sapin et commence à
lire.

Il lit :

Julien : « C’est bien bon et fidèle serviteur,… » .
Aaah ! Au moins ici on reconnaît ma vraie valeur ! La Bible c’est trop cool !
« … tu as été fidèle en peu de choses… ».
Fidèle en peu de choses !? Moi ? Alors que j’ai tout fait ? Alors que je me suis déplacé le
fémur dans le dos ? Ca suffit décidément tout le monde est contre moi, joyeux Noël...

Scène 3

Dans la rue on retrouve la foule cosmopolite qui va dans un sens croise et bouscule.
Julien croise alors l’aide pâtissier qui tient plusieurs gâteaux de manière très instable.
L’aide pâtissier (Sébastien) ne voit pas René et lui fonce dedans et tous les gâteaux sont
par terre. Ils ramassent ensemble.

Julien : Ben dis donc t’es drôlement chargé toi. Ca se passe toujours bien ton
apprentissage à la pâtisserie ?

Sébastien : Oh oui ça me plait beaucoup ! C’est pas de la tarte tout les jours, mais mon
patron est une crème d’homme, tu sais !

Julien : Et tu travailles la veille de Noël comme ça, tu cours dans tous les sens, tu vas
servir les gens genre « Voilà madame, voilà monsieur ce que vous avez commandé… ! »

Sébastien : Oui je livre plein de choses que j’ai fait. Regarde : éclairs au chocolat,
mille-feuilles, bûche de Noël et même une salade de fruits.

Julien : Joli, joli joli.

Sébastien : Eh oui ! Courir dans tous les sens et devoir sourire aux clients c’est pas du
gâteau tous les jours, mais je me dis que je contribue au fait que leur fête soit aussi
réussie ! Dans mon métier on dit qu’on ne fait pas d’omelette sans casser les oeufs, donc
je me dépense volontiers pour ces gens, même si je préfèrerai être à la maison. Mais je
suis passionné par ce que je fais, donc je ne compte pas.

Julien : Donc tu sers les gens et ça te fais plaisir, moi il y a longtemps que j’aurai laissé
tomber à ta place.

Sébastien : Ah si tu étais passionné par quelque chose, tu comprendrais. Allez je dois y
aller parce que si on me sucre le salaire, je serai chocolat !
Sébastien part.

Julien : Fidèle en peu de choses l’apprenti... Je sais pas. C’est un serviteur aussi on dirait.

Scène 4

Dans la rue, on retrouve la foule qui bouscule qui est soudain dissipée par une sirène de
pompier. Le pompier arrive en courant encore enfumé. Il bouscule également Julien.

Julien : Ah Michel, on peut dire que tu as une manière fracassante d’aborder les gens ! Et
puis d’abord, où tu cours comme ça ? T’as le feu au fesses ou quoi ?

Michel : Moi un pompier avoir le feu aux fesses ? Si ça se savait je serais grillé ! Ma
carrière partirait en fumée !

Julien : Tu travailles aussi ce soir toi ?

Michel: Affirmatif. En ma qualité de soldat du feu, pas de répit. Pompier, c’est avant tout
être enflammé pour servir les autres. ! Alors si les autres fêtent, tant mieux pour eux,
mais moi j’assure la sécurité de ces gens. Ça se passe bien, et même que parfois dans
les maisons où je vais, on m’offre un morceau de ma tarte préférée.

Julien : Tarte préférée et c’est laquelle ?

Michel : La tarte du pompier ? C’est la tarte flambée !!

Julien : A te voir je pensais que tu préférais la crème brûlée. Même en cette veille de Noël
t’es chaud pour rendre service. Comment ça se fait ? En plus tu es le seul pompier de la
ville, personne ne t’aide !

Michel : Oh pour ce qui est d’être seul, y’a pas le feu pour le moment. Un pompier
pompeux qui se pomponne c’est pas sérieux; mieux vaut cette étincelle qui allume un
incendie dans ton coeur pour servir les autres. Je brûle de servir les autres, et c’est ça qui
est important !

Scène 5

Le pompier quitte Julien et la foule revient. La foule passe et bouscule Julien. Dans la
foule on voit alors apparaître le vieillard qui ploie sous les sacs de provision.
Julien tout seul : Aider les autres, servir les autres. Tous ces gens sont des serviteurs.
Mais ils n’attendent rien en retour des autres. Pourquoi ? Moi j’ai décoré le sapin pour le
Seigneur. C’est bien bon et fidèle serviteur mais serviteur comment ? Suis-je un serviteur
pour les autres aussi ?
Il voit une jeune fille qui vend des sapins.

Jeune fille : Sapins, messieurs dames, sapins de Noël de toute taille, grand choix de
couleurs, achetez mes beaux sapins ! Ah Julien, tu tombes bien ! Tu voudrais acheter un
sapin ? Regarde j’ai un grand choix de taille ! Il y a le grand et le… petit ! Non ? Ah mais
attend, j’ai un magnifique choix de couleurs ! Regarde j’ai vert sapin, vert foncé, vert de
terre aussi , La nature ça peint en vert! Non toujours pas.

Julien : Non tu es gentille mais tu sais en matière de sapin j’ai ma dose.

Jeune fille : Attends j’ai une remise !

Julien : Une remise ?

Jeune fille : Oui ! Pour un sapin de l’an dernier que tu m’achètes, je t’offre les aiguilles
qui vont avec !

Julien : Et la remise ?

Jeune fille : Eh bien si tu es d’accord je vais chercher le sapin dans la remise alors !

Julien : Ah une remise où tu ranges tes vieux sapins. Et ça marche ton trafic d’arbres ?

Jeune fille : Pourquoi pas ? Y’a bien des tas de jeunes qui vendent de l’herbe !... La vérité
c’est que je dois vendre ces sapins pour avoir de l’argent. Ma maman ne quitte plus le lit
a cause de ses jambes…

Julien : Qu’est-ce qu’elles ont ses jambes ?

Jeune fille : Ben elle en a plus depuis cette maladie qu’elle a eue… C’est pour ça qu’elle ne
quitte plus le lit. Et ce matin j’ai dû appeler le médecin pour ma soeur. Elle est malade est
tellement nerveuse qu’on doit veiller auprès d’elle toute la nuit. C’est terrible ce qui se
passe en ce moment chez nous. Donc je vends des sapins pour pouvoir payer le médecin
pour ma famille.

Julien : Toi aussi alors tu sers les gens qui t’entourent en cette veillée de Noêl ? Et tu le
fais avec tant d’amour et de patience et de bonne volonté.

Jeune fille : De quoi tu parles Julien ? Bien sûr que je le fais avec amour, il s’agit de ma
maman et de ma soeur. En plus depuis le divorce de mes parents j’ai plus de papa pour
nous aider. Si papa et maman avaient plus réfléchi avant de se marier, ça aurait
sûrement évité que je ne doive vendre des sapins dans la rue, la veille de Noël. Mais je le
fais par amour pour ce qui reste de ma famille et je prie aussi pour mon papa et ma
maman.

Julien : Je vais t’acheter un sapin Marie.

Jeune fille : Quoi ? Tu veux vraiment ?

Julien : Oui oui, je vais profiter de ton offre spéciale « sapin sans aiguilles » comme ça il
me servira plusieurs années de suite et j’aurai pas besoin de passer l’aspirateur en
dessous passé le nouvel an, je ne me piquerai pas en le décorant et au pire ça fera
porte-manteau d’inspiration moderne.

Jeune fille : Oh merci Julien, tu me rends un si grand service !
Elle donne le sapin à Julien et Julien se retrouve seul.

Julien : « Merci, tu me rends un grand service… » Un serviteur rend service. Même cet
arbre un peu minable… Voire carrément moche peut être une source de joie si il est
vendu. Avec trois fois rien le Seigneur peut faire beaucoup… Je vais rentrer à la maison il
se fait tard maintenant.


Julien rentre chez lui. Il y retrouve sa maman qui tricote
Julien : Maman pourquoi il n’y avait personne ce soir pour m’aider à décorer le sapin ?
Les autres qui devaient m’aider sont restés bloqués en cours de route, parce qu’ils sont
encore partis trop tard, je le sais bien.

Maman : Tu sais de nos jours les gens ont tous beaucoup moins le temps. La vie devient
une course de chaque instant. C’est chacun pour soi, pour son bonheur personnel et on
ne s’occupe plus de dresser un sapin pour Noël. Mais quand les gens voient que le sapin
est absent à l’Eglise à Noël tout le monde s’interroge. Tout le monde repousse la faute et
s’excuse : « j’ai pas le temps », « mon travail me prend tout mon temps », « j’ai pas
envie cette année de m’en occuper ».

Julien : J’ai croisé beaucoup de personnes en rentrant. Marie qui vendait ce sapin
d’inspiration moderne, Michel le pompier, Sébastien l’apprenti pâtissier. Ils étaient
heureux malgré leur travail ou leur devoir pénible pourquoi ?

Maman : Parce qu’ils croient en ce qu’ils font, parce qu’ils s’engagent dans la tâche qui
leur est confiée, parce qu’ils acceptent de se mettre eux-mêmes de côté pour les autres.
Ils servent sans se poser de questions. Le Seigneur Jésus lui-même en venant sur terre à
Noël a accomplit la volonté de Dieu son Père, sans poser de questions. Son devoir de
serviteur était de mourir pour nous, pour que nous puissions être sauvés de la damnation
éternelle. Les gens que tu as croisé étaient heureux, parce qu’ils étaient consacrés à leur
devoir. Peu de gens, même des chrétiens, sont encore consacrés de nos jours. Ils rouillent
sur les chaises de l’Eglise...

Julien : Tu as raison maman, je suis un serviteur, car le peu de chose que j’avais à faire
était de dresser ce sapin à l’Eglise. Je l’ai fait pour la fête de Noël, pour le Seigneur, mais
également pour les gens qui seront là demain. J’ai fait ce que j’avais à faire c’est tout. Si
ça se trouve, le pasteur en profite pour mettre une dernière touche à son message, il prie
pour l’église, pour moi aussi peut-être. Quelqu’un a sûrement dû retourner à l’Eglise pour
monter un peu le chauffage. Mais l’année prochaine il faudra que tout le monde mette la
main au sapin. Il faudra monter une équipe prête à servir pendant cette période de Noël,
je les y pousserai moi, qui va partir.